“Scum Manifesto” de Valerie Solanas

Édition anglo-saxonne de Scum Manifesto de Valerie Solanas, publiée chez Verso Books, préfacée par Avital Ronell, 2016.

Scum Manifesto de Valerie Solanas

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Ça parle de quoi ? C’est LE manifeste qui appelle toutes les féministes radicales à, tout bonnement, éliminer les hommes, source de tous les maux de notre société et notamment de la misogynie qui asservit, viole et tue les femmes et du capitalisme qui asservit, violente et tue les pauvres.  

On trouve quoi dans ce livre ? De la misandrie + du féminisme radical + une critique en bonne et due forme de la misogynie et du capitalisme + un appel à l’insurrection massive des femmes et à la destruction totale du patriarcat + de l’humour + une bonne dose de courage.

Édition française de Scum Manifesto de Valerie Solanas, publiée chez Olympia, traduction d’Emmanuèle de Lesseps, présentation de Christiane Rochefort, 1971.

Extraits choisis

« Laisser tout tomber et vivre en marge n’est plus la solution. Baiser le système, oui. La plupart des femmes vivent déjà en marge, elles n’ont jamais été intégrées. Vivre en marge, c’est laisser le champ libre à ceux qui restent ; c’est exactement ce que veulent les dirigeants ; c’est faire le jeu de l’ennemi ; c’est renforcer le système au lieu de le saper car il mise sur l’inaction, la passivité, l’apathie et le retrait de la masse des femmes. »

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« Aucune véritable révolution sociale ne peut être réalisée par les hommes, car ceux qui sont en haut de l’échelle veulent y rester et ceux qui sont en bas n’ont qu’une idée, c’est d’être en haut. La « révolte », chez les hommes, n’est qu’une farce. Nous sommes dans une société masculine, faite par l’homme pour satisfaire ses besoins. S’il n’est jamais satisfait, c’est qu’il lui est impossible de l’être. En fin de compte, ce qui révolte « l’homme révolté », c’est d’être un homme. L’homme ne change que lorsqu’il y est obligé par le progrès technique, quand il n’a pas le choix, quand la société arrive au point où il doit changer ou mourir. Nous en sommes là. Si les femmes ne se remuent pas le cul en vitesse, nous risquons de crever tous. »

* * *

« L’artiste véritable, c’est toute femme saine et sûre d’elle, et dans une société féminine, le seul Art, la seule Culture, ce sera des femmes déchaînées, contente les unes des autres, et qui prennent leur pied entre elles et avec tout l’univers. »

Édition du facsimilé de Scum Manifesto de Valerie Solanas, dans le cadre du projet « SCUM is fun » imaginé par l’asbl RAKONTO et Nadine Janssens, NNstudio.

Qu’est-ce que j’en pense ?

Scum Manifesto de Valerie Solanas c’est une bombe. D’abord, ça fait rire, d’un rire libérateur, parce que tout est vrai et que ça fait tellement de bien de voir écrit noir sur blanc que le patriarcat forme des hommes violents et violeurs, que la virilité c’est ridicule, que le capitalisme fait courir l’humanité à sa perte – je reste très polie, je laisse le soin à Valerie Solanas d’employer les insultes et les grossièretés adéquates. Lire un texte violent qui dénonce la violence du sexisme de nos sociétés occidentales, un texte qui appelle au soulèvement général, au refus du conditionnement du capitalisme, à la violence envers ceux qui violentent et au meurtre envers ceux qui tuent, c’est une déflagration. Ça recharge les batteries quand on a un coup de mou : je vous invite à lire à voix haute certains paragraphes, ça fait un bien fou ! L’entendre dire par Delphine Seyrig et Carole Roussopoulos c’est chic. Le lire en regard de la postface de Lauren Bastide ça éclaire. Valerie Solanas a été une enfant battue, incestée, une adolescente fille-mère, une adulte travailleuse du sexe, discréditée, précarisée, internée, une femme lesbienne morte dans la pauvreté et l’oubli. Lire ce texte en 2025 est une bouffée d’air frais, qui rend hommage à cette autrice sous-estimée et donne un élan de courage pour les luttes à venir.


Comment se procurer ce livre ? Gratuitement en bibliothèque (catalogue des bibliothèques municipales de Paris, inventaire des bibliothèques de France) + neuf en librairie pour 4,50 € (liste des librairies en France) + d’occasion en librairie de seconde main (type Gibert, Boulinier…) + d’occasion sur des sites de seconde main (type Momox, Recyclivre…). N’oublions pas qu’en France, le prix du livre neuf est unique, c’est-à-dire qu’un livre neuf a le même prix partout, peu importe où on l’achète : alors, si on le peut, privilégions les librairies indépendantes et proches de chez nous !


La fiche d’identité du livre : Scum Manifesto de Valerie Solanas, publié en 1967 (Etats-Unis) et en 1971 (France). L’édition utilisée pour cet article est celle de Mille et Une Nuits, publiée en 2021, traduction d’Emmanuèle de Lesseps, postface de Lauren Bastide, 114 pages.

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“La Menstruelle”